Monsieur le Président, 

Chers collègues, 

  • Je sais combien il est difficile et compliqué d’élaborer un budget car il s’agit souvent de gérer des contradictions : 
    • La volonté de dérouler ses promesses électorales en étant tenté de faire fi de la réalité de la situation économique et sociale ; 
    • Une administration respectueuse de l’autorité politique mais souhaitant garantir les grands équilibres financiers de la collectivité et appelant, c’est son rôle, le politique à la prudence ; 
    • Les partenaires des accords électoraux qui appellent au respect des engagements pris et qui demandent des gages – chaque vote a un prix et, par exemple, faire passer à votre majorité un vote positif sur le projet d’Aréna de l’OL lors du dernier Conseil n’est pas un acte gratuit – ; 
  • Il faut, comme l’on dit, envoyer « des signes » à sa majorité, et, pour gérer ces contradictions, il faut faire des choix, trancher et ne pas simplement arbitrer : le budget, c’est aussi un acte d’autorité.
  • Vous présentez ce 1er budget de votre mandature comme un budget des grandes transitions que vous souhaitez porter : c’est en réalité un budget qui ne fait aucun choix, un budget en quelque sorte de bon père ou de bonne mère de famille, qui attendrait des jours meilleurs.
  • Il ne reflète ni l’ambition de votre programme ou de vos promesses électorales, ni la réponse forte à la crise sanitaire et encore moins à la crise sociale et économique que nous traversons.
  • Vous ne prenez aucun risque : on pourrait presque parler d’un budget de rente, de bon gestionnaire de patrimoine.
  • Mais voilà, le problème, c’est que la Métropole de Lyon, ça n’est pas la gestion de la Caisse d’Épargne. C’est un formidable outil qui peut et doit répondre à une crise sans précédent.
  • Vous aviez pris rendez-vous avec les Grands Lyonnais en leur indiquant que ce mandat était le dernier pour le climat : mais où sont donc passées vos ambitions ? 
    • Sûrement pas dans ce budget sans saveur ni ligne directrice et, surtout, sans vision de long-terme pour le territoire.
  • La vision politique, Monsieur le Président, c’est pourtant ce qui marque la qualité d’un décideur et son aptitude à cerner les grands enjeux de nos sociétés et de nos territoires. 
  • En matière de transition écologique et de services de proximité, vous ajustez à la hausse certaines lignes budgétaires, sans pour autant expliquer ce que révèle ces hausses. 
  • En matière d’économie et d’attractivité, il y a eu mégarde de notre part : nous n’avions pas compris que le passage d’une délégation dédiée au développement économique à une délégation se nommant désormais « développement responsable » signifiait un budget sobre, voire inexistant. 
    • Où sont, Madame la 1ère Vice-présidente, les dispositifs pour accompagner la mutation des entreprises sur le plan environnemental ? 
    • Où sont les outils et nouvelles structures pour booster l’entrepreneuriat ? 
    • Comment, sans ambition budgétaire, allez-vous doper l’économie sociale et solidaire, au-delà de vos grands discours enflammés ? 
    • Nous ne le savons pas.
  • Sur la question de l’insertion, comment, Madame la Vice-présidente à l’insertion, Mme Hémin, accepter de tels arbitrages dans un budget qui constate une augmentation importante des personnes en parcours RSA, avec +18% d’augmentation des dépenses liées au versement du RSA, sans aucune augmentation des moyens pour accompagner les bénéficiaires vers la réinsertion professionnelle ? 
    • Comment, madame la Présidente du MMIE, accepter cet état de fait ? 
    • Comment les opérateurs vont-ils faire face sans moyens supplémentaires ?
  • J’en profite pour faire le lien avec votre mesure phare pour la jeunesse et pour nos étudiants, en proie aujourd’hui à de grandes difficultés et à une détresse psychologique qu’il faut écouter : le RSA jeunes
  • Vous proposez 8,2 millions €/an pour 1600 bénéficiaires, soit environ 5000€ d’aide annuelle. 1600 jeunes, alors que si l’on s’en limite aux seuls étudiants, ils sont plus de 150 000 sur notre territoire.
    • Privilégier des mesures plus fortes aurait véritablement répondu à l’appel que cette génération formule à tous les décideurs : gratuité de l’abonnement TCL pour la fin de l’année universitaire, création d’un abonnement jeune à 20€ intégrant l’abonnement Vélo’v, un effort massif sur la construction de logements étudiants – Nous en proposions + 10 000 en 6 ans –, la création d’une aide à l’installation pour les étudiants arrivant dans la Métropole, sous conditions de ressources, … Bref, des mesures qui parlent à tous et pour tous.
  • En matière de ressources, nous n’avons pas manqué non plus d’être étonnés : alors que nous avions engagé en 2019 un doublement en 3 ans de la dotation de solidarité aux communes, l’aide qui permet aux communes de la Métropole de financer leurs équipements, vous décidez, vous, de baisser cette DSC et ainsi de réduire la marge de manœuvre de nos communes pour investir. 
  • Voilà donc la ligne où vous décidez, entre-autres, de faire des coupes budgétaires.
  • M. Artigny, il me semble pourtant que vous aviez voté avec enthousiasme ce doublement de la DSC, avec Mme Vessiller et Mme Baume.
  • Le budget, Monsieur le Vice-président aux Finances, ça n’est pas un document comptable, c’est un acte politique qui doit faire envie à l’exécutif de porter des politiques publiques, qui doit faire envie aux Vice-présidents de se battre pour obtenir les bons arbitrages, mais force est de constater que la lecture de ce 1er budget de votre mandat est aussi ennuyeuse qu’un acte notarié.
  • Nous avons lu dans la presse que vous alliez recruter une spécialiste des finances publiques venant du Fonds Monétaire International. 
    • Eh bien c’est encore l’heure des vœux pour cette nouvelle année : alors souhaitons que cette arrivée ne reflète pas « l’orthodoxie et la rigueur budgétaire du FMI » que notre collègue Millet a si souvent dénoncé, mais plutôt qu’elle vous donnera des conseils pour construire à l’avenir un budget de combat.
  • En matière de solidarités et de santé, comment, M. Le Vice-président Blanchard, accepter de tels arbitrages qui ne vous permettent pas de renforcer les actions dédiées et les structures accompagnant les personnes âgées et les personnes handicapées ? 
    • Je sais l’attention que vous portez à ces sujets et vous mériteriez mieux que ce budget. 
    • Je connais votre déception aujourd’hui.
  • Comment allez-vous tenir l’objectif phare de construction de 6000 logements sociaux et abordables par an, alors que : 

– Les DMTO suivent une trajectoire inquiétante du fait de la crise sanitaire, avec une baisse estimée de 2,7% pour cette année, que votre politique ne fera que poursuivre.

– Vous mettez, en 2021, 1,3M€ d’autorisation d’engagement sur l’Office foncier solidaire métropolitain, que nous avons créé et qui permet justement de produire des logements abordables. 

– En 2020, à sa création, nous avons mis 4 millions d’euros sur la table, avec l’objectif de créer 150 logements abordables dès la première année. 

– Comment, avec 1,3M€, voulez-vous que le compte y soit pour produire à terme plus de 1000 logements abordables par an ? 

– Nous ne notons par ailleurs aucune augmentation significative sur l’aide à la construction de logements sociaux. 

– Aucune action pour le développement de l’offre locative intermédiaire n’est mentionnée.

  • La réalité, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les vice-présidents, c’est que, comme pour la PPI que vous nous proposez, vous ne pouvez pas répondre à ces questions.
  • Vous vous félicitez ce matin dans Le Progrès d’être la 1ère collectivité à voter sa PPI : vous confondez sans doute la vitesse et la précipitation. Vous favorisez la communication, un peu comme votre homologue Laurent Wauquiez, au mépris de la concertation avec les maires.
  • En parlant de Laurent Wauquiez : pourquoi ne pas prendre pleinement notre part dans le plan France Relance en affichant notre ambition, aux côtés de l’État et de la Région, d’être moteur d’un dynamisme économique retrouvé en Auvergne-Rhône-Alpes, au bénéfice des Grands Lyonnais, mais aussi des territoires voisins ? 
  • On ne peut pas en permanence, car la situation sociale et économique l’exige, être en campagne électorale. 
  • M. Le Président, bénéficier et faire bénéficier la Métropole du plan de relance n’est pas un « acte de collaboration avec l’ennemi », c’est simplement faire en sorte que notre territoire, et surtout ses habitants et ses entreprises, survivent à cette crise sans précédent.
  • Vous affirmiez il y a quelques semaines, M. Le Président, dans une autre interview, votre goût pour la magie et la pâtisserie. 
    • Ce budget reflète assez bien vos deux hobbies : pâtissier, par les dosages subtils, le plus souvent symboliques, pour ne pas froisser votre majorité ; magicien, par le flou artistique qui entoure ce budget.
  • Nous n’avions pas compris votre slogan de campagne.
  • En réalité, quand vous affirmiez « la métropole pour nous », ça n’était pas la Métropole pour nous, Grands Lyonnais, pour répondre à la crise, mais pour vous, militants écologistes. 
  • Aujourd’hui, nous le comprenons : votre slogan, comme votre budget, c’est « la métropole pour quelques-uns ».
  • Je vous remercie.