Monsieur le Président, 

Chers collègues, 

  • C’est une délibération importante que nous étudions aujourd’hui. C’est la première nouvelle  véritable mesure sociale de votre mandat
  • Nous rejoignons évidemment le constat qui est dressé : pendant la campagne électorale, déjà, nous soulignions que 21,7 % des jeunes de 15 à 29 ans vivaient sous le seuil de pauvreté. 
    • C’était avant la crise sanitaire et c’était déjà près de 2 points de plus que la moyenne nationale pour cette classe d’âge. 
    • Parmi ces jeunes, il apparaissait qu’une grande partie, 30 %, avait  préalablement relevé de la protection de l’enfance.
  • Or, pour répondre à cela, vous proposez 10M€ par an pour 2 000 jeunes, soit 400€ par mois maximum, à renouveler tous les 3 mois dans le cadre d’une évaluation trimestrielle, pendant 2 ans. 
  • Nous entendons très bien que ce dispositif sera proposé en dernier recours, après épuisement de toutes les autres possibilités, qu’il pourra remplacer la garantie jeunes pour des jeunes qui seraient arrivés au bout de celle-ci, mais cela nous semble bien insuffisant au regard des enjeux. 
  • De plus, le revenu de solidarité jeunes et l’organisation que vous proposez sont tellement proches des conditions de la garantie jeunes que nous avons beaucoup de mal à percevoir la différence de cible entre ces deux accompagnements : des jeunes en situation de précarité, ni en emploi, ni en formation, ni en études, suivis par les missions locales. Le revenu de solidarité jeune va osciller entre 300 et 400€ quand la garantie jeune est de 497€.
  • Au-delà de la garantie jeunes, il existe toute une panoplie de dispositifs proposés par l’État pour l’insertion et l’emploi des jeunes, particulièrement depuis la montée en puissance du plan « un jeune, une solution », mis en place par le Gouvernement ces derniers mois.
  • Car, faut-il le rappeler, le meilleur moyen de réinsérer un jeune dans la société, c’est de le réinsérer par l’emploi, par l’engagement
  • L’accompagner financièrement est bien sûr  une nécessité même si nous avons tous conscience que pour certains le chemin sera long tant le parcours est douloureux,  mais il faut se donner les moyens de s’assurer que cet accompagnement sera dans tous cas les un tremplin vers l’insertion professionnelle, qu’il puisse lui permettre de s’émanciper , de se relever. 
  • Nous aimerions donc comprendre davantage la coordination et les complémentarités qui pourront se mettre en place avec les dispositifs existants, plus propices à l’insertion.
  • Puisque là encore, vous dressez le bon constat : oui, il y a des jeunes qui passent entre les mailles du filet de ces différentes prestations pour différentes raisons. 
  • Vous proposez votre solution avec ce dispositif. Mais à aucun moment, vous ne tracez un chemin. Comment allez-vous cibler, repérer, « aller vers » ces jeunes qui sont aujourd’hui totalement en dehors des radars ? Comment allez-vous lutter contre le non-recours ?
    • Le principal enjeu est là : c’est celui de ces jeunes en déshérence qui ne connaissent pas les missions locales, que les associations ne voient pas et qui ne connaissent pas leurs droits. 
  • Par ailleurs, les modalités que vous présentez n’aideront pas à lutter contre cela. Vous proposez en effet une revoyure trimestrielle, donc 8 rendez-vous maximum sur 24 mois. 
  • Cela nous semble être très léger au regard du public visé qui a besoin d’un accompagnement renforcé pour retourner vers l’emploi ou vers une formation. Si vous laissez un jeune, vivant dans ces circonstances, seul pendant 3 mois, vous maximisez les chances de le perdre. 
  • Nous souhaiterions également en savoir davantage sur les moyens de suivi, pour ce « fil rouge » que vous entendez mettre en place pour réduire les ruptures, dont nous avons du mal à percevoir les contours. 
  • Si vous souhaitez faire reposer l’intégralité de ce suivi sur les missions locales, déjà débordées et manquant de moyens, nous risquons très rapidement d’en voir les limites. Vous signalez que des associations pourront éventuellement instruire des dossiers, mais dans ce cas-là, lesquelles ? Sous quelles conditions ? Avec quelles subventions ? 
  • Nous serons par ailleurs vigilants à ce que ce dispositif ne se transforme pas en une nouvelle usine à gaz. Nous voyons mal la méthode que vous utilisez pour vérifier qu’un jeune ne dispose pas de ressources familiales. 
    • Comment allez-vous établir ce critère ? Est-ce que des jeunes qui vivraient, toute ou partie du temps, chez leurs parents seraient considérés comme aidés par leurs familles ? 
    • Un jeune qui recevrait une aide en nature d’un proche pourrait-il intégrer ce dispositif ? 
  • Pour que chacun puisse s’en saisir, et limiter le non-recours, il paraît essentiel de sortir du flou et d’établir des règles claires. 
  • Vous avez présenté ce dispositif comme votre solution, votre réponse à la jeunesse en précarité, notamment celle touchée par la crise, mais il semble assez évident que les étudiants seront ici les laissés pour compte. 
  • Avec le RSJ, que vous présentez comme un dispositif comblant les angles morts, vous ne désengorgerez pas les files d’étudiants devant les distributions alimentaires, vous n’aiderez pas non plus ceux parmi les étudiants qui ont perdu leurs « petits jobs » au cours des derniers mois.  
  • Enfin, nous sommes heureux de voir que des comités locaux seront mis en place par CTM afin de suivre et d’évaluer cette politique. Nous ne referons pas le débat du règlement intérieur, mais c’est une raison de plus pour regretter que les conseillers métropolitains des territoires concernés n’y soient pas conviés plus régulièrement. 
    • Ils ne pourront donc pas participer à l’évaluation régulière du RSJ alors que la collectivité pour laquelle ils sont élus l’a créée et le finance.
  • Monsieur le Président, nous le voyons, beaucoup de questions restent encore en suspens à 2 mois de son entrée en vigueur le 1er juin. Si l’objectif est simplement d’avoir un argument politique entre le 1er et le 20 juin, c’est regrettable. 
  • Cet outil, très intéressant, ne doit pas devenir un simple moyen d’affichage politique à l’aube des régionales et de la présidentielle. La Métropole de Lyon ne doit pas devenir la succursale de vos opérations électorales. Ici, seul l’intérêt des jeunes et uniquement l’intérêt des jeunes doit compter. 
  • Malgré ces réserves, nous voterons pour ce dispositif parce que, dans la période actuelle, chaque aide, même si elle concerne au final seulement quelques jeunes, est la bienvenue. 
  • Et vous nous trouverez à vos côtés à chaque fois que nous pourrons améliorer les conditions de vie des plus fragiles. 
  • Mais nous serons attentifs à ce que sa mise en place se déroule dans les meilleures conditions et que cet outil expérimental évolue dans le bon sens. 

Je vous remercie de votre attention.