David Kimelfeld – Conseil des 27-28 mars 2023

Monsieur le président,

Monsieur le MAIRE de LYON car comment ne pas m’adresser à vous qui dès la cérémonie de vos vœux nous indiquait le scénario retenu pour la presqu’île en grillant la politesse à la concertation mais aussi au Président de la métropole,

Mes chers collègues en particulier messieurs BAGNON et LUGENSTRASS véritables artisans de ce projet un peu comme TIC et TAC dans la série animée et intitulée les rangers du risque et du risque ils vont en  faire prendre aux lyonnaises et aux lyonnais et aux habitants de la métropole,

Apaiser la presqu’ile, qui pourrait vouloir s’opposer à une telle proposition ? A priori personne et nous ne faisons pas exception.

Bien au contraire, j’avais même lancé en mon temps les premières expérimentations de piétonisation de la presqu’ile et je voudrais remercier monsieur BAGNON de l’avoir rappelé tant certains ici ont tendance sur de nombreux sujets à penser Monsieur le président mais vous n’êtes pas de cela que rien ne s’était passé de digne entre l’empereur CLAUDE et votre arrivée.

Je veux donc dire que nous sommes, avec les groupes Synergie et La métropole pour tous et PIERRE CHAMBON conseiller métropolitain de cette circonscription tout comme mo  attachés à l’amélioration de la qualité de vie dans le centre-ville de Lyon, cœur de notre métropole.

Mais si l’on peut être d’accord sur l’objectif qui n’est en rien une vision, c’est plutôt sur sa mise en œuvre et sur ses potentielles répercussions que nous voudrions aujourd’hui attirer votre attention et celle de tous les grands-lyonnais.

 Ce  projet d’apaisement de la presqu’ile est marqué par un manque de vision concrète pour le devenir de ce territoire et plus largement pour la ville de LYON  ce qui explique sans doute l’absence d’études d’impact sur les déplacements, sur le devenir des commerces , sur le prix de l’immobilier, sur les quartiers alentour  pour les 10 ans à venir.

La piétonnisation, la végétalisation doivent être au service d’un projet, d’une vision et pas l’inverse. Vous êtes sans doute tombé Monsieur le Président dans le piège tendu par le maire de LYON qui n’a souvent pour vision que lui-même et sa propre image et qui souvent en oublie qu’un projet n’est pas fait que de communication mais du quotidien des habitants de la ville de LYON et de l’histoire de cette ville. Piétonniser et végétaliser ne peuvent être un projet politique .ce ne sont que des outils pour transformer la ville.

Alors pour répondre aux exigences du MAIRE de LYON, vous avez voulu faire vite, à défaut de faire bien, car vous savez que 2026 approche à grand pas et que vous n’aurez rien de très concret à présenter en bilan de ce « dernier mandat pour le climat » et en particulier à LYON.

Une fois n’est pas coutume, il nous faut lire la presse pour en apprendre plus sur vos projets. Qu’à cela ne tienne, j’ai eu le plaisir de lire l’entretien de Messieurs Bagnon et Lugenstrass  tout sourire dans le Nouveau Lyon qui porte justement sur le projet Presqu’ile.

Monsieur Bagnon nous explique ainsi que vous ne savez pas encore comment aménager la Presqu’ile, et que les aménagements pérennes seront pour le prochain mandat. J’ai bien compris que votre générosité pour le maire de LYON avait des limites. Vous êtes un chef d’entreprise et c’est tout à votre honneur d’être prudent dans vos investissements Monsieur le Président.

Et c’est la même chose concernant les bornes rétractables ou la végétalisation : vous prévoyez des études qui ne sont même pas encore lancées, et sans en avoir les résultats vous amorcez déjà une Zone à Trafic Limité (ZTL)  sans la détailler (dont la réussite est pourtant conditionnée à ces éléments ! A défaut d’une Presqu’ile apaisée, on s’achemine doucement mais surement vers une Presqu’ile en travaux pour plusieurs années.

En ce qui concerne la végétalisation, point très attendu dans cette concertation, nous restons assez dubitatifs car on sait que le réseau empêche la pleine terre dans beaucoup d’endroits.

En somme, on piétonnise d’abord et on réfléchit ensuite.

Et c’est monsieur Lugenstrass qui incarne le mieux cette pensée, en nous expliquant (toujours dans le Nouveau Lyon) que « le fait que la rue Édouard Herriot soit dans la ZTL permettra aux piétons d’investir la chaussée les samedis quand les trottoirs sont saturés » et ce alors même que les lignes de bus S1 et 27 continuent de circuler. Un comble alors que l’on souhaite justement apaiser la Presqu’ile pour éviter les accidents et les conflits d’usages !

Et je parle de piétonnisation car nous apprenons, toujours dans ce fabuleux entretien, que vous avez finalement décidé de piétonniser entièrement la section nord de la rue de la République.

Pourtant, lors de la concertation dont nous votons le bilan aujourd’hui, aucun des deux scénarios avancés ne proposait la piétonisation complète de la rue de la République.

Or cette décision est lourde de sens car elle implique une réduction drastique de la desserte de l’Hôtel de ville. On passe en effet de 10 bus principaux aujourd’hui (C3, C5, C13, C14, C18, 9, 19, s1, s6, s12) à seulement 3 bus (9, C5, et une nouvelle ligne dont on ne sait rien si ce n’est qu’elle devrait relier hôtel de ville à part dieu par le cours Lafayette en arrivant du plateau nord).

Pourtant l’évolution du système de desserte est l’une des plus fortes inquiétudes mentionnée par nos concitoyens lors de la concertation.

Et on les comprend, car la correspondance entre les métros (et notamment le métro C) et les bus est totalement rompue. Les 3 bus restants ne pourront pas absorber le flux de personnes sortant des métros venant de Caluire, Lyon 4e, Lyon 6e, Villeurbanne ou Vaux-en-velin… Et en parallèle, le métro C ne pourra pas lui non plus absorber l’ensemble des parcours entre hôtel de ville et la croix rousse.

On touche d’ailleurs ici encore une fois le manque de vision et l’absence de pensée globale. Ce projet concerne certes les 1er et 2ème arrondissements, mais il impactera aussi a minima le 4ème et le 5ème arrondissement, voire également le 3e. Or les répercussions n’ont pour l’heure pas été étudiées ou mesurées ce qui empêche toute projection de la ville à 5 – 10 ans.

Vous nous direz surement que les gens sortant du métro à hôtel n’auront qu’à marcher un peu plus pour aller chercher leur bus un peu plus loin. Mais d’une part, si cela est déjà pénible pour tout à chacun, ça l’est encore plus pour les personnes à mobilité réduite et pour les seniors  qui seront les victimes collatérales de votre manque de cohérence. Une ville à hauteur d’enfants c’est le seul  slogan de M. DOUCET jusqu’au MIPIM (les professionnels de l’immobilier présents n’en sont pas encore revenus) mais une presqu’île qui  ne sera plus à hauteurs des seniors et des personnes en situation de handicap.

D’autre part, vous le savez très bien, ce qui fait la réussite d’un réseau de transport en commun et qui fait donc que les gens l’utilisent, c’est son efficacité. Or en dévitalisant ainsi le pôle multimodal d’hôtel de ville, c’est l’ensemble du réseau qui s’en trouve pénalisé. Je ne comprends pas que le président du SYTRAL que vous êtes ait accepté un scénario pareil.

Vous annoncez une amélioration du temps de parcours du C13 alors même que le nombre d’arrêts double entre les arrêts Cordelier et Tobie Rabatel. Cela semble antinomique.

De même, les arrêts Albon et Romain Rolland vont être chargés de 3 lignes de bus supplémentaires, ce qui va forcément venir ralentir le trafic sur les deux quais.

Enfin, le 27 ne dessert plus Bellecour que dans un sens (direction Villeurbanne), ce qui est d’autant plus incohérent que ce sont les personnes venant de plus loin qui vont subir la rupture de charge, alors que les personnes venant du Vieux Lyon bénéficierons des deux arrêts actuels.

Le constat que nous faisons, c’est donc celui d’un réseau de transport en commun fortement dégradé par ce projet. Et cela sans compter la hausse attendue des usages des transports en communs induite par les restrictions de circulation et les 30% d’évaporations du trafic automobile que vous nous annoncez.

Je passerai rapidement sur la circulation automobile, car ce n’est pas le centre de mon propos.

On peut tout de même s’interroger quant aux reports de circulation de la rue grenette qui vont nécessairement venir impacter la circulation en limite de ZTL, soit le tunnel de la croix Rousse et Bellecour même si bien sûr M. BAGON, il y aura un phénomène d’évaporation et de reports sur les transports en commun à condition que le service soit au rendez-vous et à ce stade permettez-moi d’en douter.

On nous annonce ainsi +120 véhicules en heure de pointe (+7%) dans le tunnel de la Croix-Rousse, +170 (+20%) à Bellecour, et même +510 (+12%) à Perrache. Et cela sans compter vos projets de réduire à une voie le tunnel de la croix rousse pour faire passer une ligne de bus…

C’est un problème de pollution pour ces axes et je pense notamment à l’école Michel Servet dans le premier arrondissement qui verra plus de véhicules à proximité.

De même, la question du stationnement reste importante. Monsieur Lugenstrass nous explique que le « stationnement en surface est maintenu pour les habitants et ayants droit » sauf là où on végétalise et où on requalifie… Un magnifique exemple de l’absence totale de vision et du flou politique qui caractérise votre pensée « déconstruite ».

J’ai un peu de mal, mais vous allez surement me l’expliquer, à voir comment on peut maintenir du stationnement en surface quand dans le même temps on crée des voies lyonnaises, on piétonnise, et on réorganise le réseau de bus… assumez vos décisions et n’endormez pas la population.

D’ailleurs on nous annonce a minima près de 400 places en surface dont l’accès sera compromis par le réaménagement de la rue grenette… Par ailleurs on nous parle de parkings pour les visiteurs, mais lesquels et dans quelle proportion alors que vous nous annoncez que les parkings presqu’ile vont également être de plus en plus réservés aux résidents et que certains se situent dans la ZTL…

Après tous ces constats une question se pose :

Quelle est, monsieur le président, votre vision du centre-ville de LYON  à 5 voire 10 ans ?

Que souhaitez-vous :

En faire une sorte de gigantesque quartier Saint-Jean, des restaurants, des bars, mais de moins en moins de commerce de proximité, un paradoxe dans un projet d’une « Presqu’ile à vivre » ?

Car si vous souhaitez rendre le centre-ville plus attractif, ce sont les petits commerces qui vont en pâtir. Comment éviter qu’ils ne soient remplacés par des grandes chaines, alors que dans le même temps les prix de l’immobilier vont inévitablement augmenter et que leur clientèle va également évoluer.

Le problème est le même d’ailleurs pour les habitants de la Presqu’ile, et en particulier les plus modestes ou pour les classes moyennes.

Vous le savez, quand on végétalise et qu’on apaise, on fait augmenter le prix du foncier. Comment allez-vous faire pour conserver une mixité sociale, et éviter que familles modestes ne soient toujours plus chassées du centre-ville ?

La question se pose aussi d’ailleurs pour les meublés de tourisme et autres AirBnB. Des mesures avaient déjà été prises pour limiter ces locations en hyper centre et je remercie RENAUD PAYRE de son volontarisme  mais va-t-on avoir une deuxième vague de mesures pour accompagner cette Presqu’ile apaisée ?

Dans cette optique se pose également la question des terrasses. Seront-elles saisonnières comme l’étaient celles sur voiries ou prévoyez-vous des terrasses annuelles ? C’est un vrai sujet aussi bien pour les restaurants et les bars que pour les habitants.

Tout cela couplé à la diminution des commerces de proximité, on risque vite de tomber dans une Presqu’ile qui devient une rue de la soif colossale.

Vous nous parlez d’une Presqu’ile à vivre, mais ce que vous ne dites pas c’est pour qui ! Car ce qui se dessine actuellement, c’est un quartier qui se coupe petit à petit du reste de la ville, qui se vide de ses commerces de proximité, et qui pousse vers la sortie ses habitants les plus modestes et les classes moyennes.

En somme, vous êtes en train de construire une presqu’ile pour quelques-uns, pour ceux qui auront les moyens d’y vivre ou d’y venir sauf à ne pas à vous complaire dans une forme de libéralisme qui consiste à laisser faire le marché.

Mais ce que vous ne réalisez peut-être pas, c’est la responsabilité que vous portez avec ce projet, et vouloir le faire trop vite, sans vision parfaitement et sans mesures d’accompagnement pourrait avoir de graves conséquences.

Car l’échec d’une piétonisation dans une grande ville comme la nôtre, ce n’est pas seulement un échec communal, ni celui d’un exécutif. C’est un échec à 15 ans, a l’instar du téléphérique, plus personne ne s’y risquera.

Il nous semble que ce serait très dommageable pour notre ville et notre métropole bien sûr, mais également pour ce type de projets qui nous semblent être dans le sens de l’histoire et nécessaires à notre temps.

Monsieur le Président, reprenez la main sur ce dossier.

Définissez une vision pour la VILLE centre et invitez le maire de LYON à vous rejoindre dans cette réflexion.

Personne ne vous reprochera de prendre du temps pour mieux réfléchir avec tous les acteurs de la ville en prenant en compte y compris l’histoire de celle-ci.

Je vous remercie.