David Kimelfeld

En janvier dernier, nous étions plusieurs ici à regretter la mise en liquidation judiciaire de l’association du Village des créateurs victime après la crise du Covid du désengagement progressif de la Région mais aussi de la métropole dont le soutien était passé de 185 000 en 2020 à 100 000 € en 2021*.


Cette équipe qui animait depuis plus de 20 ans le passage Thiaffait était pourtant un acteur central de la redynamisation du secteur. Ce fut d’ailleurs un marqueur fort du premier mandant de Gérard Collomb. Avec Nathalie Perrin Gilbert alors maire du 1er , ils ont réussi à transformer ce quartier grâce notamment au Village des créateurs qui a eu un impact avéré et reconnu sur le développement des entreprises et l’essaimage de ces dernières dans les locaux autrefois vacants des pentes de la Croix-Rousse.


L’équipe du village des créateurs était en effet une formidable découvreuse et développeuse de talents. Depuis la création en 2001 de projet , ce sont plus de 480 jeunes créateurs qui ont été accompagnés et en 2022, elle fédérait 140 marques locales.


Pendant 20 ans le Village des créateurs a porté haut et fort, au national et à l’international, le talent et les valeurs de ces pépites et une certaine idée de la mode, celle d’une mode locale et éthique, originale et vertueuses.


6 mois après la chronique d’une mort annoncée vous nous présentez donc VOTRE projet pour le passage Thiaffait un projet comme vous l’indiquez dans cette délibération « dédié à l’entrepreneuriat textile circulaire et solidaire ».


Et alors que vous nous indiquez que « la liquidation de l’association Village des créateurs en janvier 2023 n’a pas remis en question l’orientation donnée à ce site par la SERL, la Métropole et la Ville de Lyon », ces mots disent en réalité tout le contraire sur le projet que vous portez désormais.


On ne crée plus on recycle : exit le soutien aux jeunes créateurs, exit l’aide à la professionnalisation, exit la modes et l’artisanat, exit la valorisation du patrimoine humain et culturel de ce quartier et de son histoire.
Le budget de ce projet nous interroge d’ailleurs sur ses objectifs.


En dehors de la subvention de 80 000€ de la Métropole, ses principaux revenus proviennent de la location d’espace avec plus de 36 000 € de recettes attendues de location d’espaces de co-working. Un chiffre dont on aimerait connaitre le mode de calcul.


L’absence d’autre financeur nous interroge également puisque ni la ville de Lyon ni aucun des autres financeurs historiques du village des créateurs ne sont mentionnés dans ce budget.


Les lignes de dépensent ont également piqué notre curiosité, notamment les 12 000e de « Prélèvement dirigeante » mentionnés dans la convention. Et alors que la force de ce projet serait selon vous sa capacité à former les créateurs à de nouvelles façons de créer, un seul emploi à temps partiel dédié à la formation ne semble aujourd’hui prévu avec seulement 15 000€.


Le village des créateurs était devenu une pépinière pour créateurs et designers . Vous faites aujourd’hui , comme ces chiffres le prouvent, le choix d’abandonner tous les enjeux liés à professionnalisation de ce secteur.


Certes l’un des enjeux majeurs de la mode durable est la réduction de son impact environnemental. Nous savons tous que l’industrie de la mode contribue beaucoup à sur consommation et à la pollution de l’eau, à la déforestation et aux émissions de gaz à effet de serre. Et que c’est seulement en optant pour des matériaux durables, le recyclage et des pratiques de production respectueuses de l’environnement, que la mode durable réduira ces conséquences. Mais si l’on veut réellement changer l’industrie de la mode, il faut d’abord former ceux qui en seront les acteurs demain.


C’est ce que faisait le Village des créateurs.


Refuser de prendre en compte l’existant et construire un projet en dehors des réalités de l’industrie de la mode, de son impact sur notre société, cela flatte certainement votre électorat mais cela n’aura aucun impact réel sur la grande majorité des consommateurs.


Le risque de votre projet c’est de voir cette dynamique créative insufflée depuis 20 ans s’éteindre avec un passage Thiaffait qui finalement se refermera sur lui-même et n’aura plus personne à accompagner et un quartier en plein épanouissement retrouver ses rideaux fermés.